J’ai mal à mon service public !

En s’opposant à la loi ORE (plan étudiant) on ne s’oppose pas seulement à la sélection et encore moins sous prétexte que « oh non c’est vraiment injuste, les étudiant-e-s vont devoir travailler pour avoir de bonnes notes ! », on s’oppose à une politique économique et européenne de la performance et du management.

Cette politique est souvent justifiée d’un mythe autours de la méritocratie, de l’élitisme et elle est actuellement déjà appliquée à la fac mais d’avantage encore dans les hôpitaux, si on étudiait ce que ça donne là bas ?Dans les hôpitaux, comme à la fac, on souffre d’un sous effectif (rappel : de nombreux postes gelés suite à la loi LRU) différentes personnalités conseillent de se « serrer la ceinture » à l’hôpital, le personnel relatent des maltraitances sur les patient-e-s, des cadences intenables, de nombreuses heures supplémentaires, les étudiant-e-s en santé rapportent des dommages psychologiques importants qui peuvent déboucher sur des cessations d’activités ou dans le pire des cas des traumatismes ou suicides.

Ce sous effectif à l’hôpital est dû à une stratégie de management : on parle de « tournant gestionnaire » c’est-à-dire que ce ne sont plus les médecins qui s’occupent de l’organisation de l’hôpital mais les gestionnaires et administratifs qui n’ont pas d’intérêt à savoir combien de temps il faut pour faire un bon soin, sans déshumaniser les patients, tant pis si il faut les faire attendre nus, alignés ensemble dans le couloir pour finalement les laver au jet d’eau, tant que ça augmente le rapport quantitatif de l’hôpital et sa productivité.

De même que ce sont de plus en plus de personnes extérieurs à l’université qui gèrent son administration.

Le même discours est tenu pour l’Université et pour l’hôpital : il faut faire des économies, on gèle ou supprime des postes. Cette politique de sélection n’est pas là pour conserver les meilleurs mais les plus conformes, les moins sensibles, les plus résignés, ceux qui supportent le mieux la contradiction évidente entre leurs valeurs morales et la réalité de leur emploi à l’hôpital.

Le même modèle est appliqué aux deux, non plus celui du service public, de l’éducation ou du soin, mais celui de l’entreprise.

La politique d’entreprise a déjà été détaillée dans notre article précédent au sujet du fonctionnement du CA :

« Le CA est composé de 12 enseignants-chercheurs, 4 personnels BIATSS, 4 étudiants, tous élus, et 10 personnalités extérieures nommées. Cela signifie donc qu’il y a plus de personnalités extérieures pour prendre les décisions que de personnels et étudiants réunis ! » Ces personnalités extérieures peuvent tout aussi bien être des représentants syndiqués que des représentants d’entreprise.

A l’Université de Lorraine, un siège est par exemple occupé par ArcelorMittal, un géant de la sidérurgie, qui a beaucoup plus de pouvoir décisionnel que les étudiants, en raison de son capital.

A l’hôpital ce sont les lois : Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP), Loi Organique relative aux lois de Finances (LOLF), Loi « Hôpital, Patients, Santé et Territoires » (HSPT) qui entrent dans la même politique que les loi LRU et ORE à l’Université, dont le but est de supprimer des postes, pour baisser les coûts et d’optimiser la quantité au détriment de la qualité à la fois des soins délivrés, mais aussi de l’éducation.

Cet article a pour vocation de rappeler la situation de crise dans les hôpitaux, comparable à celle déjà amorcée à l’université. Les mesures sont les mêmes et ont la même visée : la rentabilité.

C’est pour cette raison (entre autres), que nous nous plaçons dans une dynamique de convergence des luttes, en soutien aux EHPAD mais aussi aux cheminots et plus récemment aux avocats.

Difficile de finir cet article sans vous conseiller vivement de lire les traités européens pour comprendre la tournure globale que prend la France et qui lient ces différents sujets entre eux.

En conclusion : Le management et l’entreprenariat ne doivent pas gouverner le service public, rendons au service public ce qui appartient au service public !

Consulter :

L’Omerta à l’hôpital, Valérie Auslender (témoignages de la page 43 à 312, page 317-328 pour le tournant gestionnaire et l’analyse politique)

Textes cités : Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP), Loi Organique relative aux lois de Finances (LOLF), Loi « Hôpital, Patients, Santé et Territoires » (HSPT)

Notre article sur le CA : https://bloquetafac.noblogs.org/post/2018/04/17/la-fac-etait-deja-bloquee-par-le-conseil-dadministration/

LRU : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000824315

ORE : https://lookaside.fbsbx.com/file/loi%20ORE.pdf?token=AWxx9pkzNQFx4OJ72pQdCfC7LX0NJXxdQl1Ldt7_UDMd9zZx8nO2SHB0TS7AaUqL-VkvGsDzNjC4sZ8ftC8y8unZkiUTvvBqScqoDLUlYm2tXG3LyBpde5sKMsM5eRQrwIID_ABy7ixarZAIThleqA0-uWxI244_tIoDQqepr_Ikrw

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